Un plasticien peut-il aujourd’hui rester sourd – ou aveugle! - devant les
transformations en cours, grâce à l’apport des nouvelles technologies?
Il me semble que se met en place depuis la fin du 20ème siècle un nouveau
rapport au monde, “la définition d’un nouveau cadre, une nouvelle vision
globale du monde comparable à celle introduite par Brunelleschi”.
Cette citation (de mémoire) de Francastel correspond à la question que
je me suis posée en 1995 dans un texte cherchant à définir un projet
pour un D.E.A. d’Esthétique *.
Au début des années ‘90, à l'école des beaux arts de Nantes où j’enseignais,
a été mise en place une approche des nouvelles technologies dont j’ai profité.
Cela correspondait à mes recherches sur d’autres / ou de nouveaux espaces
et, en 1995 s’est présentée l’opportunité de travailler sur un projet lié
aux nouvelles technologies dans le cadre du C.N.A.M. : il s’agissait pour
un plasticien de proposer l’objet de sa recherche qui était prise en compte
par un ingénieur et aboutissait à un travail en binôme.
Mon projet était motivé par la volonté d'agrandir le territoire de la “sculpture” en utilisant les possibilités offertes par l'ordinateur * : il s’agissait de mettre en place un dispositif qui ne prend forme et sens qu’au moment de l’interaction effective d’un acteur et des probalités d'espace mémoire.
Ici donc plus qu’une installation, il s’agirait d’un processus à créer, une oeuvre ouverte, un lieu virtuel et une scénographie aléatoire générés par des narrations, des actions qui sont autant de mémoires crées et / ou revivifiées.
J’ai donc travaillé avec un ingénieur que mon projet avait interressé, persuadé, que si doit naître une nouvelle appréhension du monde, elle ne peut être le fait d’un seul individu, mais le résultat d’une confrontation de multiples talents dans des disciplines qui vont enfin retrouver la voie de l’échange.
Malheureusement, au bout d’une année, j'ai été obligé de constater que nous ne parvenions pas à trouver un langage commun et cela a donc abouti à une impasse, chacun étant incapable de pénéter dans le monde de l’autre.
On ne sort pas indemne d’une recherche qui m’avait convaincu que cet espace “uchronique et utopique” ** était le plus riche et le plus porteur d’une véritable capacité à renouveler les arts plastiques et notre rapport au monde.
Je me suis mis à cultiver mon jardin.
Dominique Arel
juillet 2014
* Ces textes des projets, DEA et CNAM, sont à la disposition de qui souhaiterait en prendre connaissance.
** L’expression est de E. Couchot : “Les deux mondes” imaginaire numérique. Hermes 1987